Par  Véronique Guillermard – Mis à jour le 31/01/2018 à 20:01 – Publié le 31/01/2018 à 19:51

L’Airbus A 321 LR décolle d’Hambourg  en Allemagne, pour son vol inaugural, hier. AIRBUS

Rachat du CSeries de Bombardier, lancement de moyen-courriers capables de franchir l’Atlantique… Airbus conforte son avance sur son concurrent américain dans un segment de marché en pleine mutation.

Hasard ou coïncidence, le premier vol de l’Airbus A321LR (Long Rayon d’action) a été programmé le mercredi 31 janvier, le jour même de la publication des résultats 2017 de Boeing. Le géant européen de l’aéronautique a occupé le terrain médiatique avec le vol inaugural réussi de l’A321LR, dont la mise en service est prévue fin 2018. Une façon d’affirmer sa suprématie sur un segment de marché en pleine mutation, où Boeing est à la peine.

Avec l’A321LR, Airbus, bientôt enrichi de la gamme CSéries du canadien Bombardier, accentue son avance sur le segment des avions moyen-courriers. Ce nouvel appareil fait «bouger les lignes», en offrant de nouvelles possibilités aux compagnies aériennes. C’est un avion hybride, un monocouloir capable de faire le job d’un avion bicouloir long-courrier grâce à son rayon d’action de 7400 km. En clair, il peut franchir l’Atlantique d’une traite avec, à son bord, jusqu’à 240 passagers (206 dans une cabine aménagée en deux classes). Il peut aussi assurer des liaisons directes entre les deux côtes des Etats-Unis et assurer des dessertes interrégionales dans toute l’Asie. «L ‘A321neo et l’A321LR R vont changer la donne, notamment au-dessus de l’Atlantique Nord. Avec eux, les compagnies pourront ouvrir de nouvelles liaisons», estime-t-on chez Airbus. Avec ses deux avions, membres de la famille A320, Airbus a lancé une vraie machine de guerre contre la famille 737 de Boeing, incapable de contrer l’offensive européenne. L’A321 a raflé, avec 1900 commandes nettes, 80 % des contrats nouveaux dans ce segment dynamique des avions dits «milieu de marché» (MoM), dont le potentiel est estimé entre 4000 et 5000 appareils d’ici à 2036.

Depuis l’arrêt de la production du 757 (en 2004), Boeing a laissé un trou béant dans sa gamme, entre les petits 737 et les grands 787 et 777, dans lequel Airbus s’est engouffré. L’A321 vise le marché du remplacement du 757, mais aussi les flottes en développement des compagnies low-costs long-courriers. A l’instar de Norwegian qui a commandé trente A321LR pour ses lignes transatlantiques, où elle utilisait jusqu’alors le 787 Dreamliner, le long-courrier de nouvelle génération de Boeing. «L’A321LR intéresse aussi des Majors comme Air France», confie-t-on à Toulouse. Boeing, dont le 737 affiche, avec toutes ses variantes, un retard de plus de 1000 avions sur la famille A320, cherche la parade. Il étudie depuis déjà deux ans le lancement d’un nouvel avion que les marchés ont surnommé le 797, porteur de ruptures technologiques et encore plus économe en carburant que TA321. La mise en service est prévue vers 2024-2025.

Boeing ne devrait plus tarder à rendre publique sa décision. «Il s’agit d’un investissement important, dont nous étudions tous les détails de façon approfondie. Nous avons un processus de décision très strict. Nom poursuivons des discussions constructives avec une cinquantaine de clients potentiels», a expliqué Dennis Muilenburg, PDG de Boeing, en marge de la publication de résultats record (voir ci-contre). Afin de parer au plus pressé, l’avionneur a lancé, en juin 2017, le 737 Max 10, une version rallongée du Max 9. L’appareil doit être mis en service en 2020, soit deux ans après TA321LR. Il pourra desservir certaines routes transatlantiques grâce à un rayon d’action de 5960 km. Assez pour un Paris- New York de 5 834 km. Il transportera dix passagers de moins que TA321LR.

Parallèlement, Boeing «poursuit des discussions productives avec les actionnaires d’Embraer, avec qui nom avons une longue histoire commune de coopération», a ajouté Dennis Muilenburg. Une alliance, sans prise de contrôle du brésilien par Boeing, semble possible. Dans les avions commerciaux, Boeing se renforcerait sur l’entrée de gamme avec les jets E2 d’Embraer et pourrait utiliser les usines du Brésil, plus compétitives que celles de Seattle, pour fabriquer le futur 797. Boeing a lancé le 737 Max 10 en juin 2017.

Hier, l’Airbus A321 LR décolle d’Hambourg en Allemagne, pour son vol inaugural.