LA TRIBUNE – Par Michel Cabirol  |  05/02/2019

La France et l’Allemagne vont financer à parts égales un contrat de 65 millions d’euros sur deux ans octroyé à Dassault Aviation et Airbus pour définir l’architecture et le concept du programme SCAF. (Crédits : DR) Paris et Berlin vont notifier un premier contrat de 65 millions d’euros sur deux ans à Dassault Aviation et Airbus qui permettra de déterminer l’architecture et le concept du programme SCAF. Par ailleurs, Safran et MTU vont sceller leur alliance pour développer le moteur de l’avion de sixième génération.

Au-delà des déclarations d’intention et des annonces, la France et l’Allemagne veulent montrer au monde entier que l’avion de combat européen du futur (Système de combat aérien du futur ou SCAF) est un programme qui décolle. Moins de trois mois après l’annonce de son lancement, Paris et Berlin vont notifier mercredi lors d’une visite des deux ministres de la Défense, Florence Parly et son homologue allemande Ursula von der Leyen sur le site de Safran à Gennevilliers, le premier contrat du programme SCAF à Dassault Aviation et à Airbus. Les deux pays vont financer à parts égales 65 millions d’euros sur deux ans pour définir l’architecture et le concept du programme.

Les deux ministres vont également officialiser le partenariat industriel entre Safran et l’allemand MTU, qui vont motoriser l’avion de combat de sixième génération dans le cadre du programme SCAF. Un accord industriel pour expliquer qui fait quoi pour la motorisation de l’avion de combat sur le principe des compétences des deux motoristes. Ce sera donc Safran en tant qu’architecte du design et des performances du moteur qui pilotera le programme alors que MTU prendra le manche pour gérer les services et la maintenance du moteur (MCO). Avec son savoir-faire et ses compétences acquis sur le M88, qui pousse le Rafale, le motoriste tricolore sera le responsable des parties chaudes du moteur ainsi que des turbines haute pression.

  1. Un Programme étude amont de 115 millions d’euros

Pour renforcer et consolider les compétences sur les parties chaudes d’un moteur, la France va en outre notifier à Safran un programme d’études amont (PEA) baptisé Turenne 2 d’un montrant de 115 millions d’euros. C’est le premier contrat lié à un moteur d’avion de combat obtenu par Safran depuis le lancement du M88. Tout l’enjeu pour le motoriste sera de bien maîtriser les parties chaudes du moteur et d’en augmenter de façon significative la poussée par rapport au M88 du Rafale (7,5 tonnes de poussée). Car l’avion de combat, qui sera au centre du programme SCAF, sera plus lourd et plus gros que le Rafale.

Ces études pourront peut-être servir à améliorer les performances de l’actuel moteur du Rafale. Augmenter la poussée du moteur entraîne de facto une hausse significative de la température du moteur. Par exemple, la température du M88 grimpe jusqu’à 1.850 degrés. Le ministère des Armées vise 2.000 degrés en 2024, puis 2.100 degrés pour le SCAF. Or, les aubes de turbine fondent à cette température. A Safran de trouver de nouveaux alliages (nickel ? céramique ?) capables d’encaisser ces températures extrêmes. Les deux ministres vont inaugurer une fonderie d’une nouvelle génération, et plus largement la plateforme de recherche sur les aubes de turbines avancées.

  1. Augmenter la poussée du Rafale ?

Pour Safran, ce PEA est du pain béni… Le motoriste plaide depuis des années pour une augmentation de la poussée du Rafale, qui s’est alourdi au fil du temps, mais sans jamais avoir eu gain de cause. Surtout, le motoriste s’inquiétait du maintien des compétences dans le domaine de l’aviation de combat. Avec la notification du PEA, l’industriel a obtenu une première satisfaction même si rien n’est décidé sur une amélioration du M88 à ce stade, explique-t-on dans l’entourage de la ministre.

La poussée du M88 peut déjà passer de 7,5 tonnes à plus de 8 tonnes – entre 8 et 8,3 tonnes – sans toucher aux entrées d’air, donc sans toucher à l’avion, simplement en travaillant sur le moteur. Soit une augmentation d’une dizaine de pourcentages. Au-delà, (9 tonnes), la modernisation du moteur passerait par une modification plus structurelle du Rafale. Pour l’entourage de la ministre, cette équation doit s’étudier et selon le ratio amélioration des performances et coût, il décidera ou d’une modernisation du M88.